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Moi, Jeune Critique de Cinéma, au Lycée Le Verger
3 juin 2013

LE COUPERET : comment Costa-Gavras associe-t-il le monde du travail des cadres à un univers de violence ?

Le film démarre au milieu de l'histoire, ce qui nous laisse supposer une multitude de flash black. Au cours du film, le spectateur découvre l'histoire de Bruno Davert, cadre supérieur dans une usine de papier, licencié à cause d'une délocalisation décidée par les actionnaires de son entreprise. Il tente de retrouver du travail mais n'y parvient pas. Après deux ans et demi de recherches il se décide à éliminer de façon méthodique toutes les personnes susceptibles d'obtenir le poste qu'il désire.

 

Un film sur l'obsession de la réussite et un contexte social difficile qui touche toutes les catégories de la population.

 

L'histoire aborde le thème du système social actuel, dans lequel l'individu doit être le meilleur. Ce conditionnement le pousse à écarter (à éliminer, dans le film) la concurrence pour ne pas se retrouver au chômage. La forme du thriller que prend le film permet de raconter une histoire qui évoque des thèmes d'actualités : le chômage, les licenciements et le modèle économique libéral. Le film dénonce donc les effets destructeurs du capitalisme et le mal être du travailleur chômeur. Le réalisateur parvient à mettre le spectateur mal à l'aise en lui montrant les conséquences de la recherche de la réussite.

 

Le Couperet, donne la vision d'un cercle sans fin, dans lequel sont engagés tous les individus à la recherche du succès.


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La mise en scène d'une nouvelle forme de violence provoquée par une situation sociale qui touche de plus en plus de personnes.

 

La mise en scène d'une situation amorale fait apparaitre un sens moral qui alerte sur une nouvelle forme de violences barbares. D'après ce long-métrage tous les hommes seraient capables de commettre des horreurs (ici le meurtre) s'ils sont dans des conditions adéquates (pour le personnage c'est la peur du chômage, synonyme d'échec et sa volonté de protéger sa famille). Costa-Gavras dévoile une violence brutale et rapide (ex: Davert abat une victime d'un coup de feu à bout portant, violent car il provoque le recul du personnage blessé et fait sursauter le meurtrier et les spectateurs).

 

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Une introspection du personnage qui permet de comprendre les conséquences du chômage sur l'individu et le cercle familiale.

 

Le chômage à une influence qui ne porte pas sur le seul  individu licencié, mais sur  la totalité du cercle familial car la pression de la recherche d'emploi est constante. Il subit l'attente de sa femme lorsqu'il revient d'un entretien d'embauche et le regard de ses enfants mais aussi la pression de son entourage moins proche (voisins, amis...). Cette angoisse, ce doute permanent provoque le repli du personnage sur lui-même et sa peur de décevoir autrui sont à l'origine de son passage à l'acte. 

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 Bruno Davert est un personnage complexe que le spectateur a du mal à comprendre car il ne peut pas justifier ses actes.

 

 Cependant, le spectateur est partagé entre différents sentiments vis-à-vis de Davert, bien que meurtrier en série.

 Le réalisateur joue en effet sur l'ambivalence du caractère du personnage, au sein d'une famille en apparence parfaite (ex: "Bah alors chéri? Tu n'aimes pas les pâtes ?"). Au départ le spectateur  éprouve de la sympathie pour Bruno, il rit mais l'histoire bascule. C'est un homme intelligent et cultivé qui va sombrer dans la violence et l'horreur. Le spectateur est face à un personnage double, qui a un côté très humain. Il est soulagé de ne pas avoir à tuer une de ses victimes car celle-ci a retrouvé du travail. Une fois les meurtres commis il se sent coupable, il panique,  tremble et vomit. Il perçoit en ceux qu'il prend pour ses ennemis la même détresse que la sienne. (ex: Il rencontre avec un ex-cadre devenu modeste vendeur de fringues sous les ordres d'un tyran minuscule). Cependant, c'est un meurtrier, aveuglé par son objectif... individualiste.

 

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Un spectateur perplexe à cause d'un passage à l'acte qui le partage entre incompréhension et tentative de justification.

Entre la capacité de tuer, avoir la volonté de tuer... et passer à l'acte, il existe un fossé moral infranchissable.

Le personnage est capable de commettre un meurtre car il est persuadé que son geste est nécessaire. Il le fait par nécessité, il vit pour sa famille et pour son travail. Malgré cela le spectateur ne peut pas lui trouver de circonstances atténuantes : pas d'alcoolisme, de misère ou de situation sordide. Il agit car la société le pousse à courir après la réussite et sa condition de chômeur est perçue comme un échec personnel. Ses actes sont réfléchis, c'est un professionnel, logique, efficace. Son expérience de cadre lui permet de s'organiser, de bannir toutes ses émotions et d'atteindre ses objectifs. Il passe à l'acte, à plusieurs reprises et perfectionne sa technique au fur et à mesure de ses meurtres.

 

Le chômage est mis en scène comme une nouvelle forme de guerre provoquée par une société qui ne prend en compte que la valorisation de l'économie.

 

 Bruno Davert est un homme en guerre contre ses concurrents et contre la société capitaliste. Comme son père qui a fait la guerre pour son pays, lui se bat pour sa famille (ex: dans son grenier il fouille dans de vieilles affaires et utilise l'ancienne arme de son père pour commettre ses crimes). Pour poursuivre sur l'exemple de la guerre, les pertes ne sont pas prises en compte. Le personnage est le reflet de la société dans laquelle il vit, il tue sans se soucier des pertes qu'il provoque, seul son objectif de retrouver du travail compte.

 De plus, le personnage ne tue que parce qu'il est poussé à le faire. Ces meurtres sont commis malgré lui. Le film rejette la faute sur le modèle capitaliste qui délaisse toute humanité au point de pousser à des extrêmes.

 

 

 

Les publicités sont le reflet d'une société qui met en place un modèle familial et tourne autour de l'économie et de la violence.

 

Le personnage est entouré de publicités qui proposent des produits qui l'attirent mais auxquels il ne peut plus accéder à cause de la perte de son emploi. Cette frustration est à l'origine de la perte de confiance en lui  et le pousse à tuer pour retrouver un emploi, un pouvoir d'achat ui lui assureraient de continuer à vivre comme il le faisait auparavant.

 La vie du personnage ressemble à une publicité. Il a deux enfants, un garçon et une fille, il est marié à une femme intelligente et sensible, il possède une maison confortable et des signes extérieurs de richesse.

 La ville où Bruno Davert vit ressemble à une publicité : propre, pelouse et haie entretenues, voitures haut de gammes... Le meurtre a aussi pour objectifs de maintenir ce cadre de vie puisque le personnage en travaillant aura les moyens de l'entretenir.


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Les publicités font passer des messages implicites au spectateur et aux personnages.

 

Celles-ci délivrent un message indirect au personnage principal. Notamment la publicité pour une montre qui est utilisée comme un poignard ou un camion croisé qui nus échappe et qui  utilise le slogan « Nous réalisons vos rêves ». Celle-ci passe, alors que Bruno Davert vient de commettre un autre meurtre. D'autres publicités, qui se trouvent dans le film délivrent des messages à double-sens: le luxe, le sexe et la violence. Les affiches publicitaires sont aussi basées sur la femme objet, à travers des publicités pour de la lingerie.

 

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La publicité et le mensonge seraient à l'origine de la violence que le film décrit. L'évolution du meurtre correspond à différent thème des publicités. Plus les meurtres se multiplient, plus le personnage se perfectionne et les publicités changent et correspondent au mode de vie du personnage. Au début du film, les publicités montrent la femme-objet (la femme du personnage ne travaille pas réellement), il commence à commettre des meurtres et les publicités portent sur des objets de luxe qui implicitement sous-entendent la violence (ex: publicités de la montre) et pour finir ses meurtres sont plus surs et les publicités montrent des voitures (objet qu'utilise Bruno Davert pour aller sur les lieux de son crime).

 

 

Le mensonge est un des thèmes du film.

 

Le personnage est un menteur du début à la fin du film. Il ment pour cacher ses activités à sa famille, il se cache derrière de fausses identités et fausses boites postales pour repérer ses victimes. Il ment aussi au garagiste, au conseiller matrimonial et à la police.

Les autres chômeurs mentent, à travers leurs CV, leurs photos embellies... Le fils du personnage principal ment pour cacher des vols et ses parents mentent pour le couvrir.

Les médias jouent un rôle clef dans le film, il ne rapporte pas la vérité mais aident le personnage à mentir. Le personnage est prêt à se dénoncer mais voit au journal télévisé que ses meurtres ont été mis sur le compte d'un autre.

 Le mensonge est un défaut moral qui est, dans le film, minimisé. La société est habituée au mensonge et cela ne dérange ni le spectateur, ni les personnages.

 

 

Dans Le Couperet, Costa Gavras montre que le travail est au centre de la vie des individus.

 Il permet de maintenir un train de vie, de préserver la famille et une stabilité psychologique. Le film montre que le travail est actuellement au centre de l'actualité et des modes de vies car il soutient l'ensemble. Cependant, dans le contexte économique actuel, le chômage met les individus dans des situations difficiles et pousse parfois à la violence. Le film décrit donc un monde du travail difficile et violent. Il existe une dualité du travail, il peut être valorisant, si l'individu s'épanouit grâce à lui. Mais il peut aussi être à l'origine d'une perte de la famille, d'une perte d'estime de soi, d'une souffrance psychologique. C'est un monde violent, dans lequel, les individus se battent pour conserver ou obtenir un emploi. Au-delà de cette lutte entre humains (qui montre cette perte des valeurs au sein de la société), c'est une lutte de l'individu  avec lui-même. En effet, celui-ci doit trouver la force de persévérer mais parfois, dans un autre extrême, cette violence se retourne contre l'individu qui se donne la mort pour échapper à la cruauté et à la violence de ce monde.

 

Estelle GRONDIN

 

 

 

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